L’entreprise visant à ne croire qu’en soi et à n’Aimer que soi existe vraiment, c’est la Suprema Cie du Soi. Firme au capital social équivalant le PIB par habitant, elle est très lucrative avec un chiffre d’affaires avoisinant la valeur marchande de l’individu moins sa valeur morale ; en somme un sacré pactole.
Les salariés de la Suprema Cie du Soi haïssent la religion sous toutes ses formes, car elle représente pour eux de la concurrence déloyale (surtout que cette fourbe vend à perte, ce qui est illégal). Un homme qui croit est un débile qui ne comprend pas que la science a résolu tous les problèmes ; un homme qui prie est un fanatique. Ces fanatiques battent leur femmes, mettent des détonateurs partout, lynchent les homos, et mangent peut-être leurs enfants tout crus (en tous cas c’est très probable, et a même été démontré par un laboratoire d’une grande université américaine). Ce ne sont pas des conditions de travail acceptables, et les syndicats ne font rien !
Non, il faut croire en soi, sinon en son psychologue, en tous cas en les humains exclusivement car on est plus heureux depuis qu’on a renoncé à l’Humilité : cette garce ne nous apportait rien et en plus elle voulait qu’on se prosterne devant Quelqu’un qu’on n’avait pour ainsi dire jamais rencontré, un boss sûrement toujours en vacances sur quelque plage paradisiaque (c’est le cas de le dire). Quel manque d’équité et d’éthique !
La Suprema Cie du Soi propose des solutions bien plus personnalisées, où chacun est son propre patron avec son propre portefeuille de clients incluant Moi, Je et Ma Poire. La compagnie est devenue tellement ancrée dans la société qu’elle a même donné des expressions courantes à la langue française, incluant « Je suis ce que je suis », « Il faut profiter », « Connais-moi toi-même», et, une dernière en cours de validation par l’Acadé-« Me » (à prononcer à l’anglaise) française : « Aide-toi, le Ciel ne t’aidera pas » .
Grâce à cette merveilleuse entreprise, nous sommes tous devenus des hommes de lumière, des Quetzacoatl blancs comme l’annonçait la prophétie inca ; nous chatoyons. Dents en or, montre en or, doudoune brillante, maquillage irradiant et voiture scintillante, nous resplendissons. Nos maux sont soignés par les médicaments et les experts, notre solitude par la télévision, notre sexualité par les boîtes de nuit, et notre laideur par les attributs matériels.
Que demande le peuple ! « Du pain et des Je », répond le Sage.
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