vendredi 11 février 2011

Danse avec les loups de mer



Le physio' a un pote qui a un voisin dont la sœur me connaît, il me laisse rentrer. J'incube immédiatement dans une cuve de chaleur corporelle, sorte de hammam alimenté par l'énergie calorique d'humanoïdes se déhanchant. C' est comme si le système de chauffage dépendait de tous ces cobayes savants, y compris moi bientôt, qui pédalent dans le vide dans un moulin hydraulique pour y entretenir la saugrenue humidité marécageuse et la température propice à la débauche, cette mère des étincelles d'un soir, qu'elles soient musicales ou sexuelles.

Très vite je me joins à un groupe de jeunes filles. Elles sont magnifiques, tournant leur tête et leur bassin au rythme d'une musique électrotechnique voire alien. Ces filles sentent bon la sueur et le parfum luxueux qu'on a déjà mille fois senti mais dont on ne connaîtra jamais le nom, car on n'aura jamais l'occasion de le leur demander. D'ailleurs, me voici déjà assis à une table, loin du groupe me terrorisant de par sa coordination et son mépris, comme un banc de poissons ne laissant pénétrer que les planctons délectables et délaissant les gros poissons-chats patauds que je suis, que beaucoup de nous sommes. Mon verre translucide abrite un élixir dégoûtant mais qui désinhibe, je l'avale en me forçant à ne pas froncer les sourcils comme quand j'observe les néons multicolores, qui flashent et qui frappent mes yeux.

Un groupe de messieurs, requins rendus un peu marteaux par l'alcool, approche des fillasses moins superbes que celles précédemment frôlées, mais tout aussi bonnes danseuses. Ils tournoient autour d'elles pour percer leur défense, je les vois chuchoter. Quant à elles je les vois se jeter des regards et se décaler ; elles ne veulent pas d'eux. Le regard vitreux des messieurs me liquéfie, ils fixent leurs proies et insistent lourdement. Moi, fort de mes quelques coups dans le nez, je me lève pour leur dire d'arrêter, mais me ravise aussitôt. Ils me réarrangeraient le portrait sens dessus dessous, et puis je ne veux pas que le sang sue de sous mes narines : j'ai déjà du mal à respirer, je me sens oppressé, et j'ai une branchite.
Qui suis-je pour intervenir dans une querelle de consommateurs ?

Le bain de foule ne m'aura rien appris, et je terminerai la soirée à manger une barquette de thon devant une rediffusion de Thalassa, jubilant de l'investissement fait dans ma télé ultra-plate, qui est somme toute bien plus rentable que d'admirer des dos fins hors de prix.

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